Le Chat est un animal avant tout attaché à son territoire, il trouve son apaisement émotionnellement dans la stabilité de ce dernier, qu’il visite, inspecte, balise et entretient parfois plusieurs fois par jour afin d’en connaitre en permanence toutes les ressources.
C’est ce qui explique que toute désorganisation de son territoire peut entraîner chez le Chat divers problèmes de comportement, des activités de substitution (boulimie, dermatite de léchage, onychophagie) aux nuisances environnementales (marquage urinaire, griffades sur le canapé…) sans oublier les agressions sur son propriétaire ou a contrario, son évitement.
Cette semaine, l’ABCdaire du PaChat vous éclaire donc sur cette notion si importante du territoire chez le Chat et vous explique comment organiser au mieux ce dernier pour favoriser le bien être émotionnel de votre petit compagnon.
La notion de territoire chez le Chat
Animal social versus animal territorial
Au cours de l’évolution, certaines espèces se sont organisées en groupes sociaux permettant de bénéficier des avantages de la vie collective, notamment pour optimiser la chasse, éduquer les petits, protéger le groupe, se reproduire.
A l’inverse, d’autres espèces, comme le Chat, ont choisir un mode de vie plus solitaire où les rencontres entre congénères ne sont rythmées que par les exigences de la reproduction. Les relations sont donc brèves et ne nécessite pas d’organisation hiérarchique entre individus, elles répondent par contre à une communication spécifique et des codes sociaux précis.
· assurer l’utilisation optimale des ressources disponibles (en nourriture, en abris…) via une parfaite connaissance des lieux, refuges, chemins de fuite…
· réduire les conflits entre voisins par des signaux spécifiques
· se reproduire et élever les jeunes en toute quiétude
· réguler les populations par émigration
Domaine vital et territoire, quelle différence ?
La taille du domaine vital est variable selon le sexe, la répartition de nourriture, les rythmes d’activités, la saison de reproduction ou encore l’humeur et la socialisation. Ce domaine vital peut être partagé avec d‘autres congénères lorsque les ressources sont abondantes et largement réparties. Dans ce cas, les Chats qui y vivent communiquent pour se rencontrer ou pour s’éviter, selon leur tolérance aux congénères et la saison.
Le territoire correspond à une portion du domaine vital que le Chat défend contre les intrusions, par un comportement agressif envers les étrangers, en particulier s’ils sont de la même espèce, et/ou des marquages préventifs notamment le long des frontières.
Lorsque plusieurs Chats cohabitent au sein d’un même logement, donc d’un même territoire, certains individus semblent plus présents et passent du temps à chasser les autres pour se mettre à leur place. Il ne s’agit aucunement de l’expression d’une hiérarchie entre congénères mais seulement de velléités territoriales plus ou moins affirmées !
Une communication olfactive essentielle
Pour cela, le Chat balise le pourtour de son domaine vital mais également les chemins qu’il emprunte en utilisant divers moyens de communication, principalement olfactifs, comme les griffades, les phéromones faciales, les marquages urinaires et les fèces, qui lui permettent de signaler sa présence, d’informer sur son état émotionnel ou sa disponibilité sexuelle.
La fonction de ces marques est avant tout informative :
· vis-à-vis des autres, pour prévenir de son passage et de sa présence et ainsi éviter le contact et un conflit potentiel
· pour lui-même, afin de se repérer dans l’espace lorsqu’il explore ou qu’il chasse et éviter de repasser dans une zone déjà explorée
Elles facilitent ainsi le partage temporel du domaine vital lorsque celui-ci est utilisé par plusieurs Chats et sert de compteur de temps pour l’émetteur lui-même, ce qui permet au Chat d’avoir une organisation spatio-temporelle de son habitat.
Ces marques se subdivisent en trois catégories distinctes :
· les marques territoriales au sens strict, qui signalent la présence du résidant à d’autres chats
· les phéromones d’identification ou de familiarisation, qui provoquent l’apaisement de l’individu qui les émet en dessinant olfactivement une carte de son territoire
· les marques d’alarme, principalement sécrétées par le Chat lors d’un stress
Le territoire du Chat : une organisation en champs territoriaux
Le territoire d’un Chat se compose de plusieurs zones, appelées champs territoriaux, plus ou moins occupées selon le moment de la journée, reliées entre elles par des voies de passage que l’animal balise par des marquages le plus souvent odorants.
Les champs territoriaux du Chat
On distingue trois catégories de champs territoriaux :
Les champs d’activité
Ce sont des espaces dédiés à une activité spécifique. Chez le chat, ces champs d’activités sont les suivants :
· les champs de chasse, dont le nombre varie en fonction des proies pourchassées car liés aux biotopes de ces dernières
· le champ d’alimentation, différent des champs de chasse lorsque le Chat est nourri par l’Homme, qui doit être facilement accessible pour lui, et idéalement au calme et en hauteur, à l’abri de tout dérangement (chien, enfant)
· les champs d’élimination, au rang desquels figure la litière si le Chat en dispose, et à partir de laquelle le Chat doit pouvoir surveiller son environnement pour s’échapper au besoin, ce qui explique que dans la majorité des cas, le Chat préfère largement les bacs ouverts positionnés dans des endroits aérés et non-confinés
·
· le champ de mise-bas, où la femelle gestante va installer son nid pour donner naissance à ses petits
· les champs de jeu, qui ne correspondant pas, la plupart du temps, à un lieu privilégié et qui sont plutôt variables dans le temps et dans l’espace, entre un chaton qui joue pour s’éveiller et un Chat adulte qui se défoule en comportement de substitution de chasse et d’exploration
· les champs consacrés aux interactions inter-espèces
Ces différents champs d’activité sont plus ou moins défendus contre les intrusions des congénères selon le type d’activité auquel le Chat les réserve.
Ainsi un congénère peut être accepté dans un champ de jeu pour une séance de jeu social mais repoussé lors d’un jeu solitaire.
Il en est de même pour l’accueil d’un partenaire de sexe opposé, selon que la saison est propice à la reproduction ou pas !
Les champs d’isolement
Le lieu d’isolement principal du Chat est son lieu de couchage mais chez les individus dont la socialisation est imparfaite, presque tous les champs entrent dans cette catégorie. Les griffades y sont fréquentes.
Déranger un chat dans son champ d’isolement peut déclencher une agression.
Le champ d’agression
Le champ d’agression ne correspond pas à un vrai champ territorial mais plutôt à la distance critique du Chat qui, lorsqu’elle est transgressée, conduit le plus souvent à une attaque violente.
Le territoire d’un Chat n’est jamais un espace figé, immuable dans le temps, car les champs territoriaux qui le composent s’étendent ou se réduisent selon son niveau de socialisation, son état émotionnel ou physiologique et les modifications de l’environnement.
Les voies de passage
Seuls un bouleversement environnemental ou des troubles comportementaux peuvent conduire à une modification des voies de passage du Chat.
Le territoire du Chat : comment l’optimiser pour préserver son équilibre émotionnel ?
Contrairement au Chat errant, le Chat de compagnie ne peut choisir librement son territoire, le plus souvent restreint à notre habitat avec un accès parfois contrôlé, voire impossible, à l’extérieur.
Il se retrouve également fréquemment dans l’obligation de supporter des colocataires non choisis.
Enfin, les projections urinaires, griffades et frottements, qui sont des comportements naturels et essentiels pour le Chat dans la gestion de son territoire, sont parfois empêchés car jugés inadaptés.
La vie avec l’Homme est donc par nature une source de stress pour le Chat, notamment lorsque l’agencement de son territoire ou la fonctionnalité de ses marquages sont perturbés par un déménagement, un nettoyage excessif de ses marques olfactives ou l’arrivée d’un congénère.
Elle peut ainsi être à l’origine de troubles anxiogènes, tels que l’anxiété de déterritorialisation ou l’anxiété de cohabitation, qui se traduisent par des comportements de marquage perturbés comme la malpropreté ou des griffades intensives mais également par des stratégies d’évitement (dépression, fugue) tout aussi problématiques …
L’organisation des champs territoriaux
Pour offrir au Chat un milieu de vie apaisant et pallier les possibles troubles comportementaux liés à un espace déstructuré, certaines règles d’organisation de ses champs territoriaux doivent impérativement être respectées.
Une telle optimisation de l’espace disponible permet de répondre aux besoins inhérents à chaque comportement et facilite par ailleurs la cohabitation entre congénères en offrant suffisamment de lieux de marquage et d’isolement.
Le Chat doit avoir à sa disposition des griffoirs positionnés de telle sorte que ses griffades soient visibles puisqu’au-delà d’y déposer ses phéromones podales, elles constituent également des marques de communication visuelles. Ces derniers sont également à positionner à proximité des champs de repos.
Le Chat doit en outre disposer d’un ou plusieurs champs d’isolement pour pouvoir se reposer en toute quiétude ou échapper à congénère en cas de harcèlement.
Par ailleurs, le Chat étant un grignoteur, capable de manger jusqu’à une vingtaine de fois par jour environ, ses gamelles doivent être accessibles en permanence et son alimentation laissée ad libitum.
Enfin, les différents champs territoriaux ne doivent pas être trop proches les uns des autres, mais pas trop éloignés non plus … car pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué n’est-ce pas ?
Ainsi, par exemple, l’aire d’élimination, avec son bac à litière, doit être au minimum à deux mètres des gamelles ou, idéalement, installée dans une autre pièce calme où le Chat ne sera pas dérangé ni effrayé lorsqu’il y fera ses besoins, soit par une agitation excessive ou la mise en fonctionnement d’un appareil électroménager.
Bref, vous l’avez compris, le territoire du Chat relève d’une structuration millimétrée alors ne vous amusez pas à déplacer à tout bout de champ gamelle, bac à litière, panières et autres griffoirs car cela aura pour conséquence de modifier l’organisation des marquages de votre Chat qui ne s’y retrouvera plus !
L’enrichissement du territoire
La vie aux côtés de l’Homme a conduit à dissocier la prédation de l’alimentation chez le Chat de compagnie. Mais si ce dernier n’a ainsi plus à se soucier de sa pitance quotidienne, il conserve ses instincts naturels de chasseur et a donc besoin d’occupations quotidiennes pour se défouler et ne pas s’ennuyer.
· des jeux de chasse, comme un bouchon ou une plume attaché au bout d’une ficelle, une balle (en mousse ou en aluminium), le rayon d’un stylo lasser ou une souris
· des jeux d’exploration, comme un labyrinthe de cartons, des sacs en papier ou un tunnel dans lesquels il est possible de disposer des croquettes que le Chat devra rechercher
· des jeux de prédation, sur le principe du pipolino, qui obligent le Chat à « attraper »sa nourriture
En comprenant le territoire de votre Chat, en respectant son balisage et en assurant sa pérennité, vous permettrez à votre petit compagnon de répondre pleinement à ses besoins instinctifs et de vivre dans la sérénité.
Il pourra alors plus facilement investir affectivement son territoire et développer avec vous, qui en êtes le gardien, une relation d’amitié et de complicité profonde.
CHATleureusement Vôtre !
Hélène