Au cours de sa vie, un même Chat enchaîne parfois plusieurs statuts.
Il peut commencer sa vie en tant qu’animal de compagnie, auprès d’une famille qui l’a adopté tout petit.
Et puis, au détour d’un accident de parcours, comme le décès de son propriétaire, une fugue ou encore un abandon, le voilà à la rue sans identification. Il perd alors son statut de Chat de compagnie pour revêtir celui moins rutilant de Chat errant … qu’il transmettra à sa progéniture si d’aventure il est en âge de se reproduire.
Certains Chats errants ont la chance, dans leur malheur, de croiser la route d’âmes charitables, qui prennent le temps de les nourrir. Certaines communes engagent également des campagnes de stérilisation, le plus souvent en partenariat avec les associations de protection animales, ce qui permet au Chat capturé, stérilisé, identifié et relâché sur son lieu de vie d’accéder au statut de Chat libre qui le protège définitivement de la fourrière et de l’euthanasie.
Le statut de Chat libre existe depuis plus de 20 ans et doit être mis en place par les communes depuis 2015. Mais force est de constater qu’encore trop peu de Chats errants en bénéficient.
L’impulsion doit donc venir de la société civile (c’est-à-dire vous et moi) qui a le pouvoir de faire pression sur la sphère politique. Mais pour cela, il est utile de disposer de tous les éléments de compréhension nécessaires. Je vous propose donc de revenir ensemble sur les bases juridiques permettant d’attribuer au Chat errant le statut de Chat libre et de découvrir tous les bienfaits qu’une population féline bien gérée peut apporter à une collectivité.
Qu’est-ce qu’un Chat errant, juridiquement parlant ?
Comment définir le Chat errant ?
Le statut de Chat errant est rattaché à la notion de divagation des Chats définie par l’article L. 211-23 du Code rural et de la pêche maritime :
Est considéré comme en état de divagation tout chat non identifié trouvé à plus de 200 mètres des habitations ou tout chat trouvé à plus de 1000 mètres du domicile de son maître et qui n’est pas sous la surveillance immédiate de celui-ci, ainsi que tout chat dont le propriétaire n’est pas connu et qui est saisi sur la voie publique ou sur la propriété d’autrui
Comment repérer un Chat errant ?
Tous les Chats nés après le 1er janvier 2012 doivent obligatoirement être identifiés, par puce électronique ou par tatouage en application de l’article R 215-15 du Code rural et de la pêche maritime (le non-respect de cette obligation est désormais passible d’une amende de 750 €).
Un échange avec les personnes vivant à proximité du lieu où le Chat est observé peut également permettre de savoir si elles connaissent l’animal et son éventuel propriétaire.
Si le Chat est identifié, ses propriétaires pourront être contactés grâce au service identification de l’I-CAD (Fichier national d’identification des carnivores domestiques).
Dans le cas contraire, c’est au maire, désigné responsable des animaux errants sur sa commune qu’il appartient d’agir (article R 211-12 du Code rural).
Par ses pouvoirs de police municipale et en vertu de l’article L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales, ce dernier doit en effet prendre toutes les dispositions nécessaires pour empêcher la divagation des Chats (et des Chiens) errants.
La prise en charge d’un Chat errant
Parce qu’un schéma vaut souvent mieux qu’un long discours … voici le processus par lequel un Chat errant passait jusqu’alors, de sa capture à son éventuelle entrée dans un processus d’adoption par l‘intermédiaire de la fourrière ou d’une association de protection animale.
Le statut de Chat Libre, l’espoir d’une autre vie pour le Chat errant
La régulation des populations de Chats errants, une responsabilité communale
Depuis le 1er janvier 2015, les Chats errants non identifiés, sans propriétaire et vivant en groupe dans des lieux publics de la commune ne peuvent plus être envoyés en fourrière. Ils doivent désormais être stérilisés et identifiés puis relâchés sur les lieux où ils ont été capturés.
Arrêté du 3 avril 2014 (JO du 17 avril 2014)
fixant les règles sanitaires et de protection animale auxquelles doivent satisfaire les activités liées aux animaux de compagnie d’espèces domestiques relevant du au IV de l’ article L214- 6 du code rural et de la pêche maritime
Ces animaux ne peuvent être conduits en fourrière que dans la mesure où le programme d’identification et de stérilisation prévu à l’article L211-27 du code rural et de la pêche maritime ne peut être mis en œuvre.
Article L211-27 du Code Rural et de la Pêche Maritime
Le maire peut, par arrêté, à son initiative ou à la demande d’une association de protection des animaux, faire procéder à la capture de chats non identifiés, sans propriétaire ou sans détenteur, vivant en groupe dans des lieux publics de la commune, afin de faire procéder à leur stérilisation et à leur identification, préalablement à leur relâcher dans ces mêmes lieux. Cette identification doit être réalisée au nom de la commune ou de ladite association.
La gestion, le suivi sanitaire et les conditions de la garde de ces populations sont placés sous la responsabilité du représentant de la commune et de l’association de protection des animaux mentionnée à l’alinéa précédent.
Le Maire doit donc désormais justifier tout recours à la fourrière ainsi qu’un éventuel refus de mettre en œuvre un programme de stérilisation. Car il n’est plus en droit d’ignorer la main tendue des Associations qui proposent d’agir sur le terrain et ne peut refuser, en théorie, d’y participer, notamment financièrement.
Du Chat errant au Chat libre, il n’y a qu’un petit pas à franchir …
C’est en 1999 que la Loi n°99-5 donne la définition du statut de Chat libre :
le Chat errant devient un chat libre lorsqu’il est stérilisé, identifié (tatouage) et que des bénévoles indépendants, des associations de protection animale ou les communes s’engagent à les nourrir dans leur environnement
Ce faisant, il permet aux Chats errants de devenir Chats libres et citoyens et leur offre ainsi une reconnaissance juridique, donc une protection légale, en ne les exposant plus à d’autres types actions de régulation, souvent plus archaïques (euthanasie, empoisonnement, …).
Ce statut de Chat libre donne notamment le droit aux Chats errants peu ou mal socialisés à l’Homme ou trop âgés, qui ne peuvent donc être proposés à l’adoption, de vivre en sécurité dans les lieux publics.
Le Chat errant devenu Chat libre bénéficie de plus d’un suivi sanitaire mené sous la responsabilité du représentant de la commune et de l’association au sens de l’article L. 211-11 du Code rural.
La stérilisation est donc le moyen le plus humain de limiter la prolifération des Chats errants et d’améliorer leurs conditions de vie en limitant disettes, blessures et maladies. En complément, le statut de Chat libre constitue pour les Chats errants l’espoir d’une nouvelle vie, faite de reconnaissance, d’acceptation et de protection !
Offrir le statut de Chat libre aux Chats errants, une décision publique responsable !
On oublie souvent que les Chats errants sont avant tout des chats domestiques nés dans de mauvaises conditions, lorsque des propriétaires irresponsables laissent leurs chats domestiques de se reproduire sans se préoccuper de l’avenir de cette descendance. Ces chatons qui grandissent avec peu, voire pas, de contact positif avec les humains développent rapidement une peur de l’Homme et deviennent de parfaits petits sauvageons ….
Les Chats errants ont également souvent mauvaise presse dans la population. Ils peuvent en effet être à l’origine de nombreuses nuisances, tant sonores (bagarres, miaulements) qu’olfactives (marquage urinaire), ils représentent un risque sanitaire pour les autres animaux domestiques en souffrant fréquemment de maladies virales contagieuses et leur capacité de prolifération devient rapidement exponentielle. Ils sont donc fréquemment chassés des lieux habités, et parfois même maltraités ou éliminés …
Mettre en place une campagne de stérilisation / identification des Chats errants constitue donc pour une commune une mesure éthique, responsable et efficace.
Car les Chats présentent malgré tout de nombreux intérêts :
·
· une fois stérilisés, ils ne génèrent plus aucune nuisance (plus de bagarre, plus de délimitation de territoire par des urines malodorantes, plus de miaulements en pleine nuit)
· les Chats libres sont en meilleure santé car la stérilisation met fin à la transmission des maladies infectieuses comme le FIV
· les Chats libres s’auto-stabilisent car même stérilisés, ils continuent à protéger leur territoire et empêchent d’autres arrivants de s’installer
Toutes les autres méthodes de régulation (euthanasie, empoisonnement) interpellent en terme d’éthique et sont de plus coûteuses et inefficaces.
Priver les chats de nourriture pour les inciter à partir n’est pas une solution, et conduit même souvent à l’effet inverse à celui recherché. Car les chats sont très attachés à leur territoire et, au lieu de partir pour chercher de la nourriture ailleurs, ils auront tendance à se rapprocher des habitations humaines (et de leurs poubelles …) à la recherche d’autres moyens de subsistance.
Par ailleurs, n’oublions pas que priver de nourriture et d’abreuvement un animal domestique est reconnu cruauté passive conformément à l’article R214-17 du Code Rural et que le Chat errant est reconnu animal domestique depuis l’arrêté du 3 avril 2014.
Une population féline bien contrôlée grâce à une campagne de stérilisation et suivie sanitairement sera donc toujours mieux acceptée par les habitants, d’autant plus qu’à travers les activités de nourrissage, de soins, de bricolage des lieux de nourrissage, elle peut aussi devenir créatrice de lien social dans la cité.
Aujourd’hui, seules les communes ont le pouvoir d’offrir ce statut protecteur aux Chats errants.
Il est donc essentiel de les sensibiliser à la cause de ces derniers et aux bienfaits qu’une population de Chats stabilisée peut apporter pour les inciter à se mobiliser et à engager des campagnes de stérilisation / identification, aux besoins avec l’aide des associations locales de protection animale.
Mais si les communes ont un rôle essentiel à jouer, attention à ne pas nous décharger pour autant de nos propres responsabilités.
La plupart des Chats errants sont d’anciens Chats de compagnie, abandonnés ou perdus, qui se sont reproduits dans la nature. N’oublions donc jamais qu’adopter un Chat reste un véritable engagement et qu’il nous appartient d’identifier et de stériliser les nôtres pour lutter contre l’abandon et la prolifération.
Face à la misère des Chats errants, nous sommes tous responsables alors unissons nos forces pour améliorer autant que possible leurs conditions de vie et n’hésitons pas non plus, lorsque cela est possible, à leur offrir de redevenir Chats de compagnie.